S'il en sort qu'il s'y
remette et s'y remette encore »
Bhaktimàrga 1-4-36
Je vais vous conter
l'histoire du village au puits unique. Dans ce village, en un temps
qui importe peu, dans un pays dont je ne sais pas le nom, les
habitants vivent de ce qu'ils cultivent. Chacun a son terrain et
travaille pour sa famille et lui-même. Chaque famille a la même
surface de jardin cultivée où tout pousse facilement à deux
conditions : que l'on travaille cette terre et qu'on l'arrose.
Cette terre est très
fertile, légère mais elle demande des arrosages fréquents. Sinon
rien ne pousse. Arrosez-la et tout ce que l'on plante pousse en
quantité. Au centre de la grande place il y a le seul puits du
village où tout le monde puise l'eau nécessaire à sa vie et à son
jardin. Ce puits a toujours de l'eau, de la bonne eau fraîche et
pure, en abondance. Il suffit de jeter son seau vide au fond et de le
remonter plein, à la force des bras.
A chacun de puiser
Chaque famille possède
sa corde et son seau. Rien n'empêche quiconque de venir au puits
avec un gros tonneau, une citerne sur une charrette attelée pour
faire des réserves. Mais personne ne peut puiser de l'eau pour une
autre famille. Selon la fréquence des arrosages, et leurs volumes,
les légumes, les fruits poussent à proportion. Arrosez peu, les
légumes et les fruits poussent peu. Arrosez beaucoup et souvent et
les légumes, les fruits poussent en quantité et rapidement. La
terre est riche, généreuse mais la récolte dépend du jardinier,
de ses efforts, de sa constance et de son appétit.
Chacun reçoit la récolte
de la peine qu'il se donne pour aller chercher l'eau, pour la verser
sur la terre du jardin. On peut se servir d'un seau de deux litres,
ou d'un seau de dix litres ou encore d'un seau de vingt litres. Plus
grande la contenance du seau est, plus l'effort que demande sa
remontée est grand, mais plus le volume d'eau remonté est important
aussi. On peut jeter le seau que l'on veut dans le puits, mais si on
jette un seau de deux litres on remontera deux litres. Il ne faut pas
s'en étonner. Quand on jette un seau de deux litres on ne remonte
pas vingt litres.
Chaque habitant en vaut un autre
Il n'y a pas de jugement
de valeur. Chaque habitant de ce village est un habitant du village
qu'il remonte deux litres ou vingt ! Il n'y a pas de personne plus
importante qu'une autre. Juste la récolte de chaque jardin est
directement proportionnelle aux arrosages. Mais après tout, si
chacun récolte selon sa faim, ses besoins...on n'a pas tous les
mêmes besoins ! Que chacun arrose son propre jardin !
La terre est la même
pour tous, les graines sont les mêmes pour tous, le temps est le
même pour tous...ce qui change c'est le travail. Ce n'est pas la
terre qui récompense ou pas, qui dit : « Il ou elle a
beaucoup travaillé je vais donc lui donner une bonne récolte »,
ou au contraire : « Il ou elle n'a pas beaucoup travaillé,
arrosé je vais donc lui donner une petite récolte ».
Comme il est dit dans Jean 14/3 : « ...pour juger et rendre
à chacun selon ses œuvres ».
Les besoins des uns ne
sont pas les mêmes que ceux des autres et chacun ira puiser l'eau du
puits selon ses besoins. Chacun juge de ses besoins. Le problème
c'est quand on manque d'eau et que l'on n'en puise pas suffisamment.
Il n'est pas utile d'accuser la terre, le puits ni le destin cruel de
cette incapacité à puiser l'eau nécessaire. Personne ne
peut puiser l'eau pour quelqu'un d'autre.
La Grâce est la même
pour tous même si tout le monde n'en a pas la même expérience.
C'est comme un endroit et un moment : l'endroit et le moment
peuvent être les mêmes pour tous, et pourtant tous n'auront pas le
même vécu de cet endroit ni de ce moment. Certains auront les yeux
fermés, d'autres les auront entrouverts, d'autres encore les auront
grand ouverts. Si vous gardez les yeux à demi ouverts ne vous
plaignez pas de ne pas bien voir ! Mais il n'y a pas un modèle de
vision, chacun voit comme il le veut, comme il le peut. La vision de
chacun ne regarde que lui. « Pourquoi vois-tu la paille qui
est dans l’œil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre qui
est dans ton œil ? » Luc, 6/41.
Chacun doit s'occuper de soi en premier
Certains ne voudront pas
avoir une vie sociale riche et ne s'occuperont que du regard de Dieu,
ceux-là sont des mystiques solitaires, d'autres aimeront Dieu aussi,
mais auront une vie sociale et familiale riche. Il n'y a rien qui
soit mieux ni moins bien ; chacun fait comme ça l'arrange. Ceci dit
tous n'auront pas la même expérience « ...pour juger et
rendre à chacun selon ses œuvres ». Au regard de Dieu
toutes les âmes ont la même valeur.
Occupez-vous de ce que
vous avez à faire et ne vous occupez pas ce que l'autre fait ou ne
fait pas. Il est impossible de juger l'état de conscience des
autres. Certains auront besoin de trois heures de méditation par
jour pour être en conscience, d'autres d'une heure et ce n'est pas
toujours celui qui médite le plus longtemps qui est le plus
conscient ni le plus dévot. Ne jugez pas aux apparences. Vous ne
savez pas ce qu'il vit. A chacun son destin. Vous pouvez être
amicaux, fraternels, solidaires mais dans le respect des différences
et de l'intimité spirituelle de chacun.
Méfiez-vous des
apparences : certains qui grogneront, qui s’énerveront, qui se
révolteront auront l'âme pleine de conscience et d'amour pour les
autres, d'autres qui paraîtront être des sages auront le cœur
plein de méchanceté. L'état de conscience est quelque chose
d'intérieur. Il se peut aussi qu'une personne énervée soit dans
l'amour et qu'une personne paraissant calme soit dans la confusion.
Il n'y a pas de règle. Le mieux est de ne pas juger et de vous
occuper de vous-même parce que pendant que vous vous occupez de la
conscience des autres vous ne vous occupez pas de la vôtre.
Ne jugez pas
Regardez, par exemple, je
vous enseigne La Voie, je vous donne le satsang qui est un des trois
piliers et certains regardent comment je parle, quels sont mes gestes
pour juger du satsang, mais en faisant ça ils se trompent ! La paix
est en eux et ils doivent chercher la vérité en eux. Ce n'est pas
moi qui vais leur donner la paix, qui vais allumer la lumière en
eux. Tous les êtres humains ont cette paix en eux et c'est en eux
qu'ils doivent chercher. L'Observance des trois piliers et de l'agya
est là pour faire ça. Ne vous préoccupez pas de mon humeur mais de
vous.
Pour les chrétiens,
Jésus-Christ était le messie, pour beaucoup de disciples du
baptiste Jean, il n'était qu'un faux prophète ! Alors, finalement,
Jésus...messie ou faux-prophètes ? Pour les Mandéens actuels (Les
disciples de Jean-Baptiste), comme pour les anciens, Jésus-Christ
était un usurpateur. Occupez-vous de votre ressenti, pas de celui
des autres. Voyez, si je me moque d'un pratiquant, le taquine il
pourra voir, dans ma moquerie le jeu que je joue avec lui pour
l'aider à avancer sur La Voie. Pour un autre ce jeu sera en décalage
avec l'idée qu'il se fait de ce que doit-être un maître spirituel.
Mais qu'en sait-il ? Alors ? Mes moqueries et plaisanteries...jeu
spirituel ou pure mesquinerie ?
Chacun fera selon sa
propre conscience et ce qu'il en fera, ce qu'il en pensera n'aura
rien à voir avec moi ni avec la vérité : ça aura à voir avec son
état de conscience et je ne suis pas responsable de ça. Mais quel
est le but d'un pratiquant ? Avancer ou me juger et se faire un avis
sur moi ? Qu'importe si mes plaisanteries ou moqueries sont le fruit
de mon mental ou un jeu de Dieu à travers moi ! Ce qui compte
c'est d'avancer, de choisir ce qui vous fait avancer. C'est comme
quand deux personnes se disputent, ne sont pas d'accord...chacune a
le choix de critiquer l'autre, de tout lui mettre sur le dos ou de
chercher à s'améliorer lui-même. Devinez quelle démarche fera
plus avancer, de s'améliorer ou d'accuser l'autre ?
Sur quoi, sur qui
avez-vous le plus de pouvoir ? Sur votre comportement ou sur celui de
l'autre ? Faites au plus simple : travaillez à vous améliorer sans
même vous demander qui a raison ou qui a tort ! Dans un conflit il y
a toujours au moins deux personnes et chacune de ces deux personnes
possède des torts. Occupez-vous de vos torts à vous. C'est juste
une question d'humilité. La conscience est du domaine de
l'intérieur. Vous êtes tous des pratiquants, que vous vous donniez
à cent pour cent ou à quarante pour cent. Personne ne connaît vos
besoins ni l'avancement spirituel de votre âme.